Nouvelles mesures répressives : et si le gouvernement s'attaquait aux vrais facteurs de danger ?

Avec de nouvelles mesures répressives contre la vitesse  et un renforcement des contrôles radars, le gouvernement prend une nouvelle fois la vitesse pour cible, au lieu de lutter contre les vrais facteurs de danger sur la route.

Crédit Creative Commons Michel Tremblay

Face au vrai problème que constitue la mortalité routière, le gouvernement cumule décidément les fausses solutions. Parmi les nouvelles mesures annoncées par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, bon nombre d'entre elles ciblent la vitesse et renforcent la traque systématique et automatisée des conducteurs, permettant ainsi au gouvernement de s'exonérer une nouvelle fois de ses propres responsabilités, à commencer par l'amélioration des infrastructures.

 

Amélioration des infrastructures : que du vent !

Alors que le facteur des infrastructures est présent dans 40 % des accidents mortels, les nouvelles mesures gouvernementales omettent totalement l'amélioration des infrastructures.

Hormis l'installation d'un nouveau type de panneau, qui vise à faire diminuer le nombre de glissières de sécurité, véritables guillotines pour les motards, la seule mesure concernant les infrastructures est l'installation de panneaux réfléchissants "sens interdit" aux bretelles de sortie des autoroutes, pour réduire le risque de contresens.

Or, cette mesure n'est qu'un simple affichage ! En effet, les accidents liés aux contresens sur autoroute ne représentent que… 9 morts par an ! Neuf morts de trop, certes, mais combien de morts pourraient être évitées chaque année, si le gouvernement se décidait enfin à agir sur l'amélioration des tronçons dangereux, dont 2 200 ont été signalés aux préfectures concernées l'an dernier grâce à Activ'Route, le réseau de signalement des endroits dangereux conçu par la Ligue de Défense des Conducteurs, et alimenté quotidiennement par notre réseau d'activ'routeurs.

 

Radars feux rouges et radars semi-fixes non-signalés

Au lieu de proposer de véritables mesures d'amélioration des infrastructures, le gouvernement poursuit donc sa politique du tout-répressif, avec un renforcement des contrôles radars.

De nouveaux radars feux rouges vont ainsi être installés dans les villes de France, alors même que plusieurs études et retours de terrain ont montré que ceux-ci provoquaient des accidents ! Pire encore : tous les radars feux rouges vont désormais également contrôler la vitesse.

Sans parler de la panoplie de nouveaux radars qui vont être mis en place cette année pour augmenter les recettes du racket routier, comme le radar le radar double-face, qui flashe la voiture à l'avant puis à l'arrière, et qui est déjà en train d'être installé sur nos routes.

Autre nouveauté : le radar "semi-fixe", également appelé radar-chantier, qui pourra être installé n'importe où en moins d'une demi-journée. Soi-disant mis en place pour "protéger les ouvriers sur les chantiers", celui-ci pourra en fait être installé à n'importe quel endroit, qu'il y ait des travaux ou non… et ne sera surtout pas signalé : comment pourra-t-il alors constituer une protection pour les personnes travaillant sur la voirie ? Encore une fois, le discours est faussé, pour masquer un nouveau piège à conducteurs.

 

Vitesse : villes à 30, départementales à 80 ?

De nouvelles mesures anti-vitesse font aussi partie du plan annoncé par le ministre de l'Intérieur.
En ville, les maires sont incités à abaisser les limitations de vitesse sur l'ensemble des rues de leur commune. Les "villes à 30 km/h" vont se multiplier, sans parler des voies périphériques à quatre, six ou huit voies, de plus en plus souvent limités à 70, voire 50 km/h.

Le ministre a également confirmé la mise en place de « l'expérimentation » de l'abaissement de la vitesse à 80 km/h sur le réseau secondaire, une mesure inutile voire dangereuse à laquelle la Ligue de Défense des Conducteurs  s'oppose depuis de nombreux mois, et contre laquelle l'association a recueilli plus d'1,5 million de signatures.

D'autant que derrière « l'expérimentation », qui sera présentée, ne soyons pas dupes, comme une éclatante réussite, c'est bien une généralisation de la mesure qui se profile… Sinon, pourquoi une telle mesure, alors même que les préfets ont déjà la possibilité de modifier les limitations de vitesse lorsqu'ils le jugent nécessaire ?  Il y a 12 ans, les radars aussi, au départ, avaient été  présentés comme une « expérimentation » !

 

Flicage à la "Big Brother"

Parmi les mesures annoncées fin janvier, on trouve également le contrôle par caméras des plaques d'immatriculation : pour l'instant, l'objectif est de vérifier que l'assurance est en règle. Mais ensuite ?

Le gouvernement prévoit d'ailleurs aussi de "soutenir les démarches européennes sur l’installation d’enregistreurs de données de la route (EDR) dans les véhicules" : autrement dit, l'Etat va favoriser et subventionner l'installation de boîtes noires dans nos voitures, pour surveiller en permanence tous nos faits et gestes !

Dans ce système digne de "Big Brother", la délation est également encouragée : ainsi, le particulier, qui jusqu'alors n'avait pas l'obligation de dénoncer la personne qui conduisait sa voiture, et pouvait ainsi lui éviter une perte de points, perdra désormais lui-même les points liés à l'infraction commise s'il n'est pas en mesure de donner le nom du conducteur. Idem pour les entreprises, qui seront désormais obligées de dénoncer le salarié qui conduisait au moment de l'infraction, pour les véhicules de société.

 

Répression bête et méchante

L'une de ces mesures symbolise finalement assez bien l'ensemble de la politique de sécurité routière du gouvernement : il s'agit de l'interdiction "bête et méchante" de l'oreillette qui pénalise inutilement le conducteur…

Oui, écouter de la musique ou participer à une conversation téléphonique à fond dans des écouteurs peut être dangereux pour la conduite, tout comme utiliser son kit mains-libres lorsque la circulation est dense ou quand la météo est mauvaise. Mais pourquoi interdire bêtement l'utilisation d'un kit mains-libres, au lieu d'encourager les bonnes pratiques, comme par exemple son utilisation lorsque les circonstances le permettent, et avec une seule oreillette, afin de rester concentré sur sa conduite ?

Cette interdiction purement répressive et non-réfléchie, dont la Ligue de Défense des Conducteurs exige le retrait avec sa pétition, qui a déjà recueilli plus de 80 000 signatures, reflète l'ensemble de la politique de sécurité routière du gouvernement : une répression de masse, systématique et automatisée, de tous les conducteurs. Ensemble, nous devons intensifier le combat pour exiger une politique de sécurité routière différente, qui cible les vrais facteurs d'accidents au lieu d'une répression systématique, permettant ainsi vraiment de sauver des vies sur la route !