Ligue de Défense des Conducteurs / Déléguée interministérielle à la Sécurité routière : rencontre entre deux visions de la sécurité routière

Pour une fois, l’État a nommé une femme de terrain à la tête de la Sécurité routière. La Ligue de Défense des Conducteurs tenait donc absolument à rencontrer Florence Guillaume, générale de gendarmerie, ex-commandante du groupement de gendarmerie de l’Ain, pour lui faire connaître notre point de vue sur l’affligeant déploiement des radars alors que la mortalité stagne, ainsi que sur les vraies autres pistes à explorer pour faire diminuer les accidents de vitesse… moins lucratives, c’est sûr. Si nos perches tendues pour dénoncer les excès de la répression routière n’ont évidemment pas été saisies, plusieurs portes ont tout de même été ouvertes.

Souvenez-vous : Marie Gautier-Melleray, la précédente Déléguée interministérielle à la Sécurité routière – elle n’a d’ailleurs pas fait long feu – était auparavant maître des requêtes au Conseil d’État et avant elle, Emmanuel Barbe était conseiller diplomatique ! Autant dire qu’avec eux, en matière d’échanges constructifs, il y avait peu de chances que la Ligue de Défense des Conducteurs obtienne autre chose qu’un dialogue de sourds : leur position dogmatique reposait quasi exclusivement sur la répression systématique de la vitesse.

La nomination d’une gendarme à la tête de la Sécurité routière nous est donc parue enfin pertinente. D’autant que notre association milite pour que les forces de l’ordre soient davantage présentes sur les routes pour assurer la prévention et la répression des comportements vraiment dangereux… C’est pourquoi nous avons souhaité rencontrer Florence Guillaume : nous savions que cette fois, les sujets que nous allions aborder seraient écoutés sans mépris ni condescendance. Ce qui a été le cas, même si notre préoccupation principale, à savoir mettre fin à une politique ultra répressive où le contrôle automatique de la vitesse constitue la valeur-refuge de l’État, n’a guère trouvé d’écho auprès de notre interlocutrice.

Toutefois, Florence Guillaume, à qui nous faisions connaître notre pétition « Zéro sanction pour les mini-dépassements » (déjà plus de 200 000 signatures !) s’est prononcée en faveur de la mesure proposée l’an passé par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, concernant l’abandon du retrait de point dans le cadre de ces « excès » de moins de 5 km/h hors agglomération. « On peut admettre une petite tolérance pour les infractions à caractère involontaire. Il faut distinguer irresponsabilité et inattention », a commenté la Déléguée interministérielle à la Sécurité routière. Dommage qu’elle ne nous rejoigne pas sur le fait que si on ne retire plus de point pour ces toutes petites infractions, mais que l’on conserve l’amende, cela confirme que pour l’État, l’essentiel c’est les recettes engendrées par ces « inattentions »… En attendant, pour ce fameux abandon de retrait de point – qui constituerait un premier pas – on ne voit toujours rien venir ! Ne vous inquiétez pas, de notre côté on n'a pas baissé les bras.

Vous le savez, notre association ne se contente pas de se montrer impitoyable vis-à-vis de la répression aveugle et automatisée. Nous avons également apporté des solutions concrètes, pour vraiment sauver des vies. Nous avons ainsi présenté à Florence Guillaume notre proposition de transformer l’actuelle formation post-permis (sept heures de théorie entre 6 mois et un an après le permis, permettant de gagner de six mois à un an de permis probatoire, sur la base du volontariat) en une session de même durée, mais se déroulant majoritairement sur circuit, au volant… avec des moniteurs capables d’enseigner les réflexes d’urgence (évitement, freinage d’urgence…). La Déléguée interministérielle a trouvé cette initiative « intéressante », même si elle doit « voir dans quelles conditions elle pourrait être mise en place ». Ça change du « ça coûte trop cher » de sa devancière au même poste !

Florence Guillaume nous a aussi prêté une oreille très attentive, lorsque nous lui avons présenté Activ’Route, notre plateforme communautaire de signalement de zones dangereuses. Sachant que le facteur infrastructure apparaît dans 30 % de accidents mortels, inciter les conducteurs à indiquer sur notre appli les ornières, les défauts de marquage au sol, les ralentisseurs trop hauts…, informations qu’à la Ligue de Défense des Conducteurs, nous transmettons directement aux collectivités afin qu’elles résolvent le problème, constitue en effet une initiative particulièrement concrète pour améliorer la sécurité routière ! L’état des routes concernant tous les usagers, nous avons enfin abordé le sujet du partage de la route avec les « nouvelles mobilités ». Ici, le constat de la Déléguée interministérielle rejoint complètement le nôtre : « Chacun doit respecter la règle et la connaître. Pour les automobilistes, l’enseignement de la conduite et le passage du permis permettent de partir du postulat que c’est le cas. Ils ont conscience d’utiliser un moyen de transport, et ça passe par des étapes telles que mettre sa ceinture ou allumer ses phares pour circuler la nuit. En revanche, à vélo ou trottinette, les gens ne sont pas forcément conscients qu’ils utilisent, eux aussi, un moyen de transport. C’est sur cela qu’il faut travailler. » Pour une fois que la Sécurité routière et nous, nous sommes d’accord…