La responsabilité de l’Etat, grande absente des mesures du CISR

Le Comité interministériel de la sécurité routière du 2 octobre dernier a présenté 55 mesures pour lutter contre la mortalité sur les routes françaises. Malheureusement, l’Etat ne met pas sa responsabilité en jeu et l’objectif est toujours de traquer et sanctionner les usagers. 

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Plusieurs ministres se sont réunis lors du dernier Comité interministériel de la sécurité routière pour présenter 55 décisions. Bilan : l’Etat n’engage pas sa responsabilité. Parmi les annonces, 22 mesures concernent ainsi la répression, 21 décisions n’auront aucun impact sur la sécurité routière, et 12 visent à rendre plus acceptables les objectifs de la puissance publique. La politique de sécurité routière se résume encore une fois à de la répression routière.

Parmi les trois axes qui composent la sécurité routière, le gouvernement sanctionne le conducteur, surveille son véhicule, mais à aucun moment n’évoque le dernier axe pourtant indispensable : les infrastructures, dont il est en charge. Explication : les budgets d’entretien des routes sont en diminution. L’Etat se dédouane de ses obligations et invoque des économies budgétaires. Quand on sait que certains revêtements permettent de diminuer la distance de freinage par deux, pourquoi tout notre réseau routier n’en est-il pas couvert ?

La répression est plus rentable, 22 annonces vont ainsi permettre de la renforcer. Face aux mauvais chiffres de la mortalité routière,c’est le comportement et le soi-disant "relâchement" des conducteurs qui est avancé. La solution ? 250 radars supplémentaires, 10 000 leurres, le recours au secteur privé pour renforcer les contrôles, l’immobilisation instantanée des véhicules, la multiplication des constats d’infractions sans interception. Sans oublier le recours à la technologie (Lapi, limitateur de vitesse non débrayable, boîte noire) pour mieux surveiller et sanctionner à distance.

Les pouvoirs publics se contentent d’édicter des batteries de mesures peu utiles à la sécurité routière pour faire croire qu’ils agissent. 21 décisions n’auront ainsi aucun impact sur la mortalité routière. Par exemple, les autorités veulent imposer le port de gants et créer un nouveau label pour les équipements à destination des deux-roues motorisés. Le gouvernement veut également établir une base de données nationale des vitesses maximales autorisées, croiser les fichiers qui concernent les comportements des usagers de la route, et améliorer les statistiques relatives au nombre de kilomètres parcourus. Enfin, le gouvernement veut dématérialiser les relations des conducteurs avec l’administration.

Par ailleurs, 12 annonces permettent aux autorités de rendre plus acceptables les objectifs de répression routière. Il s’agit notamment d’informer les citoyens de l’affectation des crédits issus de l’argent des amendes et valoriser le rôle du Conseil national de la sécurité routière. Ces décisions permettent également de conforter les organismes qui publient des études sur la sécurité routière, et sur lesquelles l’Etat s’appuie pour dénoncer un pseudo mauvais comportement des conducteurs.

Le gouvernement compte enfin sur la mobilisation de la réserve citoyenne de l’Education nationale ainsi que sur la création d’un label « sécurité routière » pour communiquer et atténuer le sentiment de répression.

Au lieu de ces mesures injustes et inefficaces, c’est la responsabilité de la puissance publique qui aurait dû être engagée. Mais que peut-on espérer en la matière, dès lors que ces 55 décisions sont prises en amont de la réunion. Puis présentées aux différents acteurs responsables de la sécurité routière lors d’un Comité interministériel d’à peine deux heures.