Lettre ouverte au Président Macron

Baisse de la limitation de vitesse à 80 km/heure : ne ralentissez pas les citoyens en reniant les principes que vous avez-vous-même édictés pour dynamiser le pays.

Monsieur le Président,

Le 5 septembre dernier, dans votre discours aux préfets, vous avez constaté en évoquant la sécurité routière « nos chiffres ne sont pas bons » et demandé « qu’un nouveau plan puisse être adopté à l’automne. »

La principale mesure de ce plan risque fort d’être un abaissement généralisé de la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes bidirectionnelles, soit sur la quasi-totalité du réseau secondaire.

Cette mesure n'est pas seulement impopulaire, comme le prouvent les 2 millions de signatures qu'a recueillies notre pétition "Non à la baisse des limitations de vitesse".

Elle est également en totale contradiction avec les principes que vous avez vous même édictés en introduction de ce même discours pour « transformer en profondeur le pays autour de deux fils conducteurs qui en assurent la cohérence » :

« D’une part libérer et protéger, cela vaut pour l’économie, la sécurité publique (…). En sur-administrant, (…) nous avons étouffé l’économie et la société en faisant croire que l’Etat était omnipotent, qu’il pouvait répondre à tout en déresponsabilisant progressivement, en sur-réglementant bien souvent. (…)

Le deuxième fil directeur c’est investir et faire confiance, nous dépensons trop par volonté de tout faire mais nous n’investissons pas assez.

Libérer et protéger, investir et faire confiance sont ces deux fils directeurs. »

Procéder à cet abaissement généralisé de la vitesse à 80 km/h, c’est priver les Français de la liberté de rouler à une vitesse adaptée, sans pour autant les protéger puisqu’il n’y a pas de lien scientifique établi entre vitesse et accidents.

C’est continuer à les déresponsabiliser comme le fait la politique de répression par les radars depuis quinze ans, en leur faisant croire qu’obéir mécaniquement à une règle administrative (un panneau de limitation de vitesse) est gage de sécurité, alors que l’élément essentiel de la sécurité est une conduite responsable, faite de vigilance et d’anticipation.

Limiter uniformément la vitesse à 80 km/h sur toutes les routes, c’est le contraire même de « faire confiance » aux citoyens et à leur capacité à adapter leur conduite et leur vitesse aux circonstances. C'est ralentir et infliger une punition collective à des millions de conducteurs qui n'ont jamais eu le moindre accident.

Cette punition est d'autant plus insupportable qu'elle fait suite à un manque d’investissement public dans l’entretien et l’amélioration des routes. Avec plusieurs années de baisses de budget, les pouvoirs publics s’exonèrent de leur principale responsabilité en matière de sécurité : l’entretien et l’amélioration du réseau routier. Or il s’agit bien là, non pas de dépense vaine, mais d’investissement dans la sécurité et dans la fluidité des trajets qui sont aux sources du dynamisme économique et du lien social et familial.

Monsieur le Président, nous vous demandons de ne pas avaliser la baisse de la limitation de vitesse à 80 km/h, contraire aux principes que vous souhaitez pour transformer et dynamiser  le pays.

Enfin, si certains conseillers prétendent que baisser la vitesse est la seule solution pour réduire accidents et mortalité routière, c'est faux.

Nous en voulons pour preuve l'expérimentation durant deux ans de cet abaissement à 80 km/h qui s’est soldée par un fiasco.

Un fiasco parce que, pour améliorer la sécurité des usagers des tronçons où le 80 km/h était expérimenté, les pouvoirs publics ont réalisé des travaux de rénovation et d’aménagement de ces tronçons.

Ce faisant, ils ont fait la démonstration tout à la fois du manque d’efficacité à attendre de cette baisse de vitesse et de l’urgence qu’il y a à entretenir, réparer et améliorer les endroits dangereux propices aux accidents.

A la place du 80 km/heure, mesure de régression et de punition qui se doublera d'une explosion de PV-vitesse, la Ligue de Défense des Conducteurs demande de revenir à une politique humaine, faite en accord avec les principaux intéressés, à partir de règles respectables, et qui ont permis de baisser la mortalité routière depuis les années 70 (outre les améliorations spectaculaires des véhicules) :

- campagnes d’information et de prévention ;

- présence des forces de l’ordre pour interpeller et sanctionner les conducteurs au comportement dangereux ;

- enfin et surtout, amélioration constante du réseau routier. Cela pourrait même être fait à moindre coût pour les finances publiques, en réaffectant les budgets alloués aux radars. Plutôt que de multiplier un peu partout les obstacles à la circulation, les feux à récompense, chicanes, rétrécissements et innombrables dos d’âne, qui coûtent un argent fou, il vaudrait mieux aménager les intersections dangereuses, rénover la signalisation au sol et réparer les nids de poule.

Ce sont deux millions de conducteurs responsables, soucieux de leur sécurité et de celle des autres, qui vous demandent de renoncer à l'abaissement de la vitesse à 80 km/h pour le remplacer par des mesures conformes à l'esprit des réformes que vous souhaitez mener : libérer et protéger, investir et faire confiance.